Dégustation de la nouvelle cuisine nippo-bavaroise.
La conclusion d’un accord de collaboration entre Toyota et BMW sur le développement d’une voiture de sport (et de technologies d’électrification et d’allègement) remonte à 2012. Six ans plus tard, le fruit de ce travail a pris des formes très concrètes avec la présentation à l’été 2018 du roadster BMW Z4, puis de la nouvelle Supra.
La Supra A90 ressuscite un label laissé à l’abandon pendant 17 ans. L’ADN Supra intègre un six cylindres en ligne et une transmission aux roues arrière, japonais et bavarois n’auront sans doute pas eu de peine à se mettre d’accord sur ce point. Le six cylindres en question est un BMW B58 qui développe 500 Nm entre 1600 et 4500 t/min, et dont la puissance culmine à 340 chevaux entre 5000 et 6500 t/min.
Peinte dans cette teinte Lightning Yellow (Nitro Yellow aux Etats-Unis), la Supra attire les regards. Le nombre de personnes qui m’ont accosté pendant cet essai sort de l’ordinaire, tout comme les candidats spontanés au road racing rencontrés sur route, un peu trop enthousiastes à mon goût.
Sous les spots du salon de Genève, la finition de la Supra ne paraissait pas trop engageante, mais dans les faits, j’ai plutôt été séduit. Le cuir est grossier, les plastiques bon marché abondent, mais dans l’ensemble, je m’attendais à pire. Le cachet est par contre nettement en retrait par rapport à l’Alpine A110. Sur notre Supra quasi neuve, certains assemblages de la planche de bord laissaient à désirer en son centre, et notre voiture émettait régulièrement des craquements en provenance du coffre.
Tous les équipements proviennent de la banque de composants de BMW, des commodos aux contacteurs de phares en passant par la molette “iDrive”, son écran et son interface, ou encore le levier de sélection de boîte à impulsion. Ce n’est pas une critique, l’ensemble est de qualité, juste un rappel assez explicite de la genèse du projet Supra.
La position de conduite est très bonne. Le rembourrage latéral réglable du dossier conducteur est bienvenu mais les rembourrages de placets m’ont un peu scié les cuisses à la longue. Reste le plaisir d’avoir une position allongée, plus difficile d’accès mais nettement plus engageante une fois installé que sur des compactes à hayon. Le placet ne culmine qu’à 25 cm du plancher, mesure objective d’une position de conduite allongée.
Le B58 s’ébroue de manière démonstrative mais est relativement discret le reste du temps. Les amateurs d’onomatopées variées seront déçus, Toyota n’a pas induit d’effet de manche à l’échappement. En substitut c’est le chant naturellement élégant du six cylindres en ligne qui joue la partition, avec un peu plus de volume si le mode sport est engagé.
Avec “seulement” 340 chevaux revendiqués pour 1523 kg vérifiés, la Supra paraît presque sage dans le contexte de la course à l’armement que se livrent Mercedes et Audi sur leurs compactes badgées AMG et RS, mais au volant, c’est surtout le couple et sa disponibilité qui dominent l’expérience. La réponse à la moindre sollicitation est immédiate, énergique, répliquant dans l’axe longitudinal les réactions latérales du châssis. Que BMW parvienne à délivrer autant de couple, d’onctuosité et de répondant avec un simple turbo monoscroll est remarquable.
Toyota fait référence au nombre d’or de Fibonacci pour justifier le rapport entre empattement et voie arrière, ou plus précisément le fait que le quotient est (légèrement) inférieur à 1.61 (2470/1589=1.55). Difficile voire impossible de savoir à qui de BMW ou Toyota nous devons les choix fondamentaux, mais le résultat est réjouissant.
Agile sans être nerveuse, la Supra est une belle démonstration de certains fondamentaux de la physique, notamment le lien entre la hauteur du centre de gravité et les réactions à la prise d’appui. Les liaisons font recours à des solutions classiques (jambes McPherson à l’avant, systèmes à 5 bras à l’arrière), avec un amortissement réglable à deux niveaux, couplé à la sélection du mode sport.
Celui-ci devient rapidement le mode de prédilection: le tarage n’est pas punitif, la sonorité ne saoule pas, et les réactions sont très naturelles, invitant à déconnecter le contrôle de stabilité. En emmenant assez de vitesse pour charger latéralement le train arrière, le postérieur devient volontiers mobile en sortie de virage si l’on puise dans le couple moteur à disposition et confier au différentiel piloté – une autre contribution de BMW – d’éviter un patinage de la roue arrière intérieure.
L’élégance de la Supra est sa mesure et son homogénéité: aucun des ingrédients de l’ensemble moteur-boîte-châssis-freins ne détonne par rapport au reste, contribuant à un ensemble très cohérent qui invite naturellement à augmenter le rythme.
La monte de Michelin Pilot Super Sport est très bien adaptée à ce châssis et donne la confiance pour aller chercher des appuis de plus en plus importants, se reposer sur un train avant net et franc, puis aller chercher la limite du train arrière tout en soignant la précision des impulsions et la propreté des trajectoires.
Sur nos cols de référence, la Supra n’est pas un déversoir à sensations faciles, mais un coupé sportif rigoureux et performant qui réjouit par la pureté et la franchise de son comportement. Les réactions du châssis sont nettement plus conventionnelles que celles de l’Alpine A110, avec des mouvements de caisse beaucoup plus contenus et des limites d’adhérences nettement plus faciles à cerner.
Le caractère de l’ensemble est donc un peu décalé par rapport au style extérieur assez extraverti de la Supra, plus en retenue et en nuance que les lignes assez tapageuses ne pourraient le suggérer. Nul doute que les accessoiristes et tuners de tous poils fourniront des opportunités de forcer le trait, mais la base est nettement plus attrayante qu’une GT86 et sa motorisation fade.
Au quotidien, la Supra est parfaitement sociable et docile, acceptant de se plier à de longs trajets autoroutiers ou à des déplacements pendulaires. L’ouverture de son coffre est curieusement étroite, mais l’intérieur est suffisamment large pour caser des bagages en suffisance pour deux occupants. Envisager cette auto comme première voiture est certes un choix de passionné, mais pas une gageure. La consommation sur l’essai a été de 10.0 L/100km (9.8 L/100km selon l’ordinateur de bord).
Affichée 79’000 CHF, la Supra ne nécessite (ni n’offre d’ailleurs en Suisse aucune option). Les seuls choix disponibles sont les teintes métallisée si l’on contracte une allergie pour le rouge ou le jaune, et l’extension de garantie à 4 ans. Ce n’est pas une Z4 au rabais, mais une Z4 coupé restylée par Toyota et vendue au prix d’une Z4 roadster. La différence se fera sur les options, la dotation de série de la BMW étant significativement moins riche que celle de la Toyota.
Celles et ceux que le style de la Supra A90 font craquer n’ont pas à s’interroger sur les qualités intrinsèques de la voiture. Le fruit de la collaboration BMW Toyota est recommandable sans réserve, et une belle démonstration que les coupés sport, malgré leur diffusion confidentielle, conservent un avantage net par rapport aux compactes dopées aux hormones de puissance.
Prix et options
Toyota GR Supra Premium | CHF 79’900 | € 67’900 |
Prix total | CHF 79’900 | € 67’900 |
Face à la concurrence – caractéristiques techniques
Toyota GR Supra | Alpine A110 | |
Moteur | L6 2998 cm3 turbo | L4 1798 cm3 turbo |
Puissance (ch / t/min) | 340 / 5000-6500 | 252 / 6000 |
Couple (Nm / t/min) | 500 / 1600–4500 | 320 / 2000-5000 |
Transmission | AR | AR |
Boite à vitesses | Auto 8 | EDC 7 |
RPP (kg/ch) | 4.48 | 4.40 |
Poids DIN (constr.) | 1523 (1495) 51.9%/48.1% |
1110 (1080*) 43.4%/56.6% |
0-100 km/h (sec.) | 4.3 | 4.5 |
Vitesse max. (km/h) | 250 | 250 |
Conso. Mixte (constr.) | 10.0 (9.7) | (6.1) |
Emissions CO2 (g/km) | 170 | 138 |
Réservoir (l) | 52 | 45 |
Longueur (mm) | 4382 | 4180 |
Largeur (mm) | 1854 | 1798/1980 |
Hauteur (mm) | 1294 | 1252 |
Empattement (mm) | 2470 | 2420 |
Coffre (L) | 290 | 96+100 |
Pneumatiques | 255/35R19 275/35R19 |
205/40 R18 235/40 R18 |
Prix de base (CHF) | 79’900 | 62’700 |
Prix de base (EUR) | 67’900 | 55’800 |
*1103 kg en configuration Première Edition.
Nos remerciements à Toyota Suisse pour la mise à disposition de la Supra GR.
Galerie de photos
Afficher la galerie de photosLiens
Le sujet du forum – les articles Toyota – les essais de coupés – à lire: