Essai Toyota GT86: it’s gone 86

Premier contact avec la Toyota GT86 sur les routes de Catalogne et sur piste. 

Quelques semaines auparavant, au moment où j’apprends que je vais avoir la chance de couvrir le lancement suisse de LA voiture que j’attends le plus en cette année 2012, me revient en tête l’entrainante chanson de Pet Shop Boys – New York City Boy – dans laquelle figure l’expression. Exclusivement américaine et propre au jargon de la restauration, « it’s gone 86 » signifie que tel ou tel plat n’est plus disponible au menu. Suite aux consécutives disparitions de la Supra, puis de la Celica, puis de la MR2, le catalogue sportif de Toyota s’était petit à petit amenuisé jusqu’à devenir inexistant. Regrettable, compte tenu des qualités respectives des modèles concernés, qualités qui avaient été sublimées au travers du temps par les diverses maisons de tuning, comme le veut la tradition japonaise. Il y a presque trente ans, c’est cette même culture du tuning qui fit arriver à pleine maturation celle qui allait devenir emblématique d’un sport alors illégal et qui allait révéler le jeune et inconnu Keiichi Tsuchiya : la Corolla AE86.

Le bien-nommé « drift king » est à cette époque plus un street racer qu’un professional driver. Comme nombre d’autres amateurs, en journée il bichonne sa voiture et perfectionne sa technique de base ; le soir, c’est la compétition. Elle se déroule de façon informelle sur les désormais célèbres « touge » (à prononcer tôô-gué), routes de montagne en japonais. Il s’agit la plupart du temps d’un duel, avec des règles qui peuvent varier de façon infime, mais qui vont habituellement dans ce sens :
– Départ en roulant, voiture l’une derrière l’autre, la course débute lorsque la voiture leader entre dans la première courbe.
– A la sortie de la dernière courbe, si le conducteur qui avait démarré devant finit avec une avance de plus d’une voiture et demie, il gagne.
– A la sortie de la dernière courbe, si le conducteur qui avait démarré derrière finit devant, il gagne.
– A la sortie de la dernière courbe, si le conducteur qui avait démarré derrière finit dans une marge d’une voiture et demie, une autre course doit déterminer le vainqueur.

Symptomatique de l’esprit régnant sur les lieux, on attribue à Tsuchiya cette phrase marquante : « Les vrais hommes font la course en descente ». Certes, rien n’empêche de concourir dans la montée, mais lorsque l’adversaire est valeureux et qu’on veut lui faire honneur, la course doit se dérouler en descente. Doubler dans ces conditions relève dès lors de la prouesse et comporte bien entendu énormément de risques, avec notamment la possibilité de finir en bas, beaucoup plus bas, ou sculpturalement encastré dans un arbre ou une glissière, à choix.

S’inspirant des techniques des pilotes professionnels, les amateurs découvrent qu’il y a moyen de conserver une haute vitesse dans les courbes si l’on maîtrise la voiture en glissade. C’est dans ce contexte que le drift en tant que sport à part entière prend ses racines et ici-même que l’AE86 fera merveille. Légère (sous la tonne), propulsion, avec un rapport poids-puissance favorable (moteur entre 115 et 140 chevaux), c’est surtout son équilibre qui fera et fait encore d’elle une voiture extrêmement recherchée.

Effectuons une avance rapide de vingt ans et nous nous retrouvons au milieu des années 2000 où l’obsession du “green” a sonné le glas du véhicule de plaisir sur l’archipel nippon ; des icônes du drift telles que les 200SX, RX7, Soarer ou même Skyline GTS (préférées aux GTR car propulsion au lieu de 4×4), il ne reste rien. Si l’on veut être bien vu, il faut désormais communiquer non plus sur la sportivité mais sur la propreté, la réduction des émissions devient le maître-mot. Enfin, pas tout à fait…

2006, dans les cerveaux d’ingénieurs de Toyota et de Subaru (qui ont formé une alliance un an auparavant) germe une idée : collaborer sur une réalisation qui comblera le vide laissé par les défuntes voitures de sport simples et accessibles. Deux ans plus tard, le projet FT-86 est bien en route. Le cahier des charges est précis :
1) Moteur avant avec transmission aux roues arrière.
2) Pas de turbo.
3) Centre de gravité extrêmement bas.
La voiture doit être légère (cible à 1’200kg) et communicative aussi bien sur route que sur piste, mais par-dessus tout, le leitmotiv qui gouverne en dictateur impérieux l’ensemble du projet s’inscrit en trois lettres : FUN !

Ce sont ces trente années d’histoire de l’automobile japonaise que je me remémore sous l’éclat de ce brillant soleil levant du 25 mai, alors que mon regard se pose enfin sur celle à qui incombe le fardeau de se montrer la digne héritière d’une lignée quasi éteinte. La GT86 mérite-t-elle de reprendre le flambeau de la « drift car » accessible ? Peut-elle raviver la flamme du sport au sein de Toyota ?

Quelques minutes plus tôt, à mon arrivée à l’aéroport de Barcelone, j’ai été pris en charge, ainsi qu’un autre confrère, par une assistante de chez Toyota qui nous a expliqué le planning de notre journée après nous avoir offert un petit déjeuner. Notre but premier est de rallier le mystérieux (je n’avais alors rien trouvé sur Internet) Park Motor Racing Track avant midi. Des trois itinéraires qui nous sont proposés, nous choisissons évidemment le plus long, ce qui nous vaudra une charmante balade d’un peu plus de 150 kilomètres au travers de paysages variés rappelant beaucoup le sud de la Provence.

Quittant l’aéroport, alors que mon confrère est au volant, un premier constat s’impose rapidement sur l’autoroute : la suspension est relativement souple. Pour l’instant, je ne sais si je dois être déçu ou non, mais avant de vouloir du sport à tout prix, je reconsidère le fait que la voiture a été conçue afin d’être utilisable aussi bien en tant que voiture plaisir qu’en tant que voiture quotidienne – son habitabilité et ses dimensions compactes, ainsi que sa relative frugalité (l’ordinateur affichera un 9.6 L/100km au terme d’une journée bien sportive) l’autorisent à porter cette étiquette.

Un quart d’heure plus tard, l’autoroute s’est muée en route côtière, route qui eût été somptueuse si elle n’avait été limitée à 50 kmh et parsemée de diesels en tout genre ainsi que de cyclistes un brin masochistes (pour les connaisseurs, pensez Fréjus à Le Lavandou…) ; les 2h30 promises par le GPS pour nos 150 kms nous paraissent alors soudainement plus pertinentes. « Alors, la GT86, c’était comment ? » « Bah, ça cruise bien. Y’a pas de bruit, c’est assez confortable. Pas fatigant, quoi. » Pour ce dialogue sorti instantanément de nos esprits en besoin de dérision, nous en venons même à regretter de ne pas déjà être au volant de la future version cabriolet. Prenant notre mal en patience, nous décidons au premier parking venu d’effectuer une brève halte dans l’optique de capturer quelques clichés tant qu’il est possible de bénéficier de la splendide toile de fond procurée par la Méditerranée.

Dieu merci, nous finirons par nous enfoncer dans les terres et circuler sur des routes certes moins grandioses mais surtout moins fréquentées ! Néanmoins, afin de maintenir un rythme de croisière correct, l’obligation de doubler se manifeste relativement rapidement. Mon coéquipier, qui a une préférence plus marquée pour le tout-terrain, se retrouve alors en territoire peu familier. Sur ce dernier type de véhicule (comme sur bon nombre d’autres produits actuellement), il suffit en principe d’enfoncer la pédale à 2’500 tours et l’on dépasse prestement. Sur la GT86, il en est tout autrement ; vous êtes bien en présence d’un moteur japonais atmosphérique dans la plus pure tradition.
De 1’000 à 5’000 tours, vous flottez dans les eaux paisibles de la Mer Morte. A 5’000 tours… hmm… VTEC just kicked in, yo !!! Oups, désolé 😉 Ici, évidemment point de VTEC, mais l’effet est en tout point similaire ! Le bruit, la respiration, la progression de l’aiguille sur le compteur et le proverbial coup de pied au cul ; bref, la bête sort brutalement de son sommeil. Vous l’aurez donc compris : doubler = obligation de passer un rapport inférieur, voire deux. La contrainte n’en est pas nécessairement une, jongler avec les rapports maintient le conducteur alerte, disons qu’il s’agit plutôt d’un style ou d’une école de conduite, que j’affectionne entre parenthèses.

Suite à une étape obligatoire à mi-parcours durant laquelle nous avons été agréablement ravitaillés, cavaliers comme destrier, mon coéquipier me propose avec fair-play un échange de siège. Hormis la suspension, mon bilan en tant que passager se résume à l’appréciation de la climatisation (simple et fonctionnelle) et des sièges semi-baquets, d’un confort et d’un soutien tout à fait corrects mais dont le tissu provoque une certaine transpiration du dos ; j’aurai l’occasion en soirée de conduire un modèle équipé des sièges cuir/alcantara nettement plus agréables – une des seules options outre le pack aérodynamique. Aussi j’ignore si ma perception me joue des tours, mais en situation réelle, le côté cheap de l’intérieur que j’avais perçu lors du Salon de Genève 2012 ne me frappe plus du tout.

 

Avant de m’installer derrière le volant, histoire de savoir à quel type de grip m’attendre me vient l’idée de jeter un œil aux pneus. Surprise ! Non pas à cause de la marque, Michelin en l’occurrence, mais à cause du modèle : Primacy ! Oui, il s’agit des mêmes 215/45 R17 que ceux montés d’origine sur les Prius 3 ! Bon, soit, on verra bien. On n’a pas non plus 600Nm à gérer, me dis-je (trois fois moins, m’apprendra en fait la documentation). Je trouve rapidement une position de conduite idéale, il n’y a rien à redire où que ce soit, pédales, volant (365mm, soit le plus petit que Toyota ait jamais mis de série sur une voiture), levier de vitesse (débattement et résistance proches de la perfection), instrumentation (on aurait éventuellement apprécié une jauge de température d’huile), tout est idéalement dimensionné et qui plus est, les deux lignes qui rehaussent les flancs du capot me permettent d’avoir une idée très exacte de la largeur de la voiture. J’ai cru comprendre que tout ceci était l’œuvre du “néo-fonctionnalisme”. Nous y reviendrons. Staaart !

10 minutes. C’est le temps qui se sera écoulé sur des routes totalement inconnues, à un rythme plutôt soutenu aux dires de mon passager, avant que je juge parfaitement sûr de débrancher toutes les aides électroniques, tellement cette GT86 est saine. Tout enclenché, un premier coup de gaz prononcé à mi-virage fait intervenir l’ESP de façon on ne peut plus prévisible. Un tournant plus loin, mode Sport activé, l’ESP se manifestera un peu plus tardivement. Traction Control débranché, les roues sont déjà nettement plus libres de patiner. Puis c’est le débranchement total, seul le différentiel Torsen reste pour m’aider à dompter les 200 chevaux. A ce moment-là, je pressens d’ores et déjà que l’héritage de l’AE86 a été transmis avec succès : l’équilibre parfait semble au rendez-vous. Comme l’explique Tetsuya Tada, l’ingénieur en chef du projet, une répartition 50:50 n’est pas nécessairement gage d’un comportement idéal (la GT86 est à 53:47), par contre une différence de ne serait-ce qu’un centimètre sur le centre de gravité a nettement plus d’impact, or celui-ci a été abaissé à 46 cm. Les transferts de masse sont palpables à tout instant, les pneus et la suspension vous transmettent précisément ce qu’il vous reste comme marge d’adhérence, le décrochage est prévisible et progressif, le rattrapage simplissime, la voiture inspire confiance, jusqu’au point, verra-t-on au cours de la journée, de vous rendre meilleur pilote que vous ne l’étiez au début du voyage, ce qui est la marque des toutes grandes voitures de sport.

 

En réalité, l’AE86 n’est pas la seule ancêtre dont les gènes ont été injectés dans l’ADN de la nouvelle venue. Elle en hérite certes la philosophie (un poids léger et une étude approfondie de la répartition des masses favorisant un équilibre optimal), mais aussi – Toyota l’espère – cet esprit de customisation au travers de l’aftermarket, afin d’en faire une voiture non seulement populaire, mais aussi de plus en plus redoutable au travers du temps.
L’autre défunte à s’être penchée sur le berceau de la GT86 est la première sportive de Toyota, la Sport 800, dont les ingénieurs ont voulu conserver l’architecture : moteur boxer à l’avant et transmission aux roues arrière.

 

Puis pour compléter la trinité, la 2000GT est venue offrir son style (sur demande du chef, un modèle en parfait état trôna dans le bureau des designers afin qu’ils puissent s’en inspirer durant la dernière phase de gestation), la ligne qui encadre les fenêtres latérales est quasi identique, on retrouve aussi des influences dans le caractère du pare-choc arrière et l’absence de lignes coupant la superstructure du cockpit est également un clin d’œil. Outre ces considérations esthético-historiques, il faut reconnaître que le design global est particulièrement réussi, même si je dois concéder ma préférence à la version Concept FT-86 II dont les phares, tant avant que arrière, rendaient l’engin plus racé, mais compte tenu du fait que la GT86 subira des upgrades sur une base annuelle, je ne perds pas l’espoir de les voir apparaître un jour en production.
Petite anecdote : une quatrième fée, plus inattendue celle-là, a veillé tout au long du développement routier : la Porsche Cayman. Considérée par Tada-san comme la mesure-étalon, il affirme dans une humilité toute japonaise qu’il ne souhaitait pas la battre en termes de performance, mais obtenir le même feeling de conduite. A entendre les commentaires dithyrambiques de certains journalistes, la mission semble plus que réussie.

Le “néo-fonctionnalisme”, concept sous le signe duquel le design a été placé, proche du “form follows function” tout en conservant un important côté esthétique, a débouché sur une forme moderne et minimaliste tout en étant familière et nostalgique. Pour le côté fonctionnel, une technique toute particulière a été employée : “l’aéro sandwiching”. La carrosserie (dessous de la voiture inclus) est sculptée de sorte à se retrouver compressée par l’air aussi bien en vertical qu’en latéral, cela éviterait le recours à des appendices aérodynamiques disgracieux et favoriserait grandement l’équilibre. Comme mentionné un peu plus haut, le “néo-fonctionnalisme” trouve également son application dans le design intérieur, tout ici est orienté “pratique”. Aucun gadget ne viendra distraire le pilote en dehors du GPS, avec lequel nous aurons eu quelques bruyants désaccords. Forcément, lorsqu’on se retrouve notamment à circuler pendant 7 kilomètres sur une voie rapide qui n’existe pas sur la carte tout en ayant pourtant suivi scrupuleusement les indications de guidage et que le recalcul de l’itinéraire nous fait perdre un bon tiers du parcours fun initialement installé par les assistants Toyota, nous grognons ! Le soir venu, me baladant dans Barcelone, je me retrouverai aussi plus d’une fois envoyé dans un sens interdit ou une rue fermée ; sans déblatérer sur l’interface, qui comparativement à certaines applications smartphones, peut être considérée comme perfectible. Mais en fin de compte, il faut avouer que cet élément ne concerne pas directement la voiture en tant que telle, d’ailleurs il est en option.

Midi. Arrivés à destination selon le GPS et après avoir erré dans l’enceinte de l’immense complexe (« Et ben oh, il est où le circuit ? Tu paries que c’est une piste d’essai, genre Boxberg ? » « Non, mieux, un centre genre TCS, hahaha ! »), nous découvrons l’étroit chemin caché qui va nous mener en contrebas vers la plus grosse partie de plaisir de la journée : Ze circuit. Et quel circuit ! Incorporé tardivement à ce que nous découvrons être le Parcmotor Castelloli, sa piste asphaltée de 4.1 km avec des pentes allant jusqu’à 8.79% offre, sans doute en grande partie grâce à son pont, le tracé le plus réjouissant que je connaisse après Spa et le Nürburgring.

Mais puisque les émotions creusent le ventre, autant le remplir au préalable ! A cet égard, Toyota nous a préparé un fastueux buffet avec grillades en direct, mais au détour d’une assiette, il me semble entrevoir un visage connu. Je retourne discrètement jeter un œil sur la liste d’inscription pour la décharge vis-à-vis de la piste, et oui, c’est bien lui, Jason Plato (et l’équipe de télé de Fifth Gear) est parmi nous. Nous serons à moult reprises graciés de crissements tonitruants résonnant au travers de toute la carrière dans laquelle s’inscrit le circuit. Spoiler avant l’épisode : la voiture semble lui plaire 😉

Mais autant qu’à moi ? Il s’agit d’une autre question. Cette voiture sous-motorisée aux dires de certaines personnes se révèle une alliée de choix. Oui, l’accélération n’est pas foudroyante, oui, la vitesse de pointe n’est pas phénoménale, mais quel équilibre et quelles sensations dans les courbes ! Souple et docile pour un usage quotidien en toute tranquillité si vous restez bas dans les tours, maintenez-la entre 5’000 et 7’500 tours – la boîte 6 est bien étagée pour cela – et vous avez une petite merveille ! Même mon collègue qui se prétendait trop vieux pour ces pitreries se laissera finalement convaincre en toute fin de session et en ressortira exalté : « Ah ben je me serais pas cru capable de ça. Elle est super cette caisse ! ». Pressenti sur la route, confirmé sur circuit, pas une fois elle ne me fera un coup tordu, la direction reste précise en toutes circonstances et les freins répondront toujours présents malgré les tours enquillés par les différents journalistes sur place – nos voitures de route n’étant pas assurées pour le circuit, une petite flotte de cinq véhicules subit des assauts répétés durant toute la journée sans broncher. Autre anecdote significative ajoutant du crédit à l’auto, pour leur première participation aux 24 heures du Nürburgring, deux GT86 courant respectivement en catégories V3 et en SP3 se sont arrogées chacune la victoire de leur classe. Cela laisse présager du bon.

Le bémol ? Allez, il en faut bien un. Deux, même. La voiture est bridée. En tout cas, à mon sens. Je n’aurais pas lu les infos sur la version STI en préparation chez Subaru, j’aurais pu les fournir intuitivement.
L’échappement (dont le diamètre mesure 86mm à la sortie des tubes chromés) est ultra comprimé ; même en pleine accélération, de l’extérieur on ne perçoit pas un bruit, pour une sportive s’entend. De l’intérieur, ça ronronne raisonnablement, mais la note manque de caractère. Si vous vous attendiez à l’habituel grondement de basse des boxers Subaru, vous allez être déçus. En même temps, il s’agit d’un tout nouveau moteur (dont l’alésage et la course mesurent tous deux 86mm ; encore une référence) auquel Toyota a absolument tenu que l’injection directe (D4S) soit intégrée. D’ailleurs, la gestion de l’injection donne un feeling étrange à l’accélération, on a le sentiment que la puissance a été volontairement jugulée aux environs des 3’000 tours, il y a un creux palpable, vraisemblablement confirmé par les premières lectures au banc de puissance.
La bonne nouvelle dans tout cela ? C’est que les tuners vont pouvoir s’en donner à cœur joie !
Aussi, lorsque je lis les prévisions d’une version STI à 250 chevaux uniquement grâce à une admission retravaillée, un échappement libéré et une meilleure gestion moteur avec limiteur repoussé plus haut, cela ne fait pas l’ombre d’un doute dans mon esprit, malgré les réserves inhérentes à un gain aussi élevé pour un moteur atmosphérique.

18h30. Nous voilà au terme du parcours, de retour à Barcelone, logés dans un somptueux hôtel situé sur la colline de Tibidabo dominant tout Barcelone. On peut le dire, l’organisation de Toyota au long de ce séjour aura été de toute grande classe. La présentation marketing qui précède notre repas du soir me montrera à quel point Toyota envisage l’avenir de la GT86 avec sérieux et positivité. L’ambition de ventes en Suisse se situe à 450 véhicules d’ici fin 2012 et à 700 sur les douze mois suivant le lancement. Le prix de 41’900 CHF semble raisonnable si l’on considère l’équipement et la garantie offerts plus le fait que lors de leur dernière année de production (2005), la MR2 s’affichait à 38’800 CHF et la Celica TS à 43’900 CHF. Il faut désormais que le prix soit équilibré face la concurrence, mais existe-t-elle seulement ? La MX5 a moins de chevaux, moins de places et un poids à peine inférieur. Toutes les autres candidates sont soit plus lourdes, soit avec transmission aux roues avant. La Megane 3 RS à laquelle on tend à la comparer a un comportement routier et un comportement moteur diamétralement opposés. Alors que dire si ce n’est : courez l’essayer afin de constater à quel point cet engin est unique dans le paysage actuel !

Enfin, pas tout de suite, car si vous effectuez un détour par une concession Toyota (ou Subaru), vous risquez fort de ne faire face qu’au désarroi, d’une part parce que vous chercherez en vain cette fameuse GT86, son arrivée n’étant prévue que pour le 28 juin, d’autre part parce la liste d’attente risque d’être longue selon vos spécifications souhaitées. Les japonais, plutôt conservateurs dans leurs prévisions de vente, n’étaient certainement pas à même de s’attendre à un tel tsunami. Entre le 3 février et le 27 mars, Subaru, qui a pu introduire sa sœur jumèle (la BRZ) sur sol nippon avant Toyota, a écoulé 3’551 unités. Les objectifs mensuels initiaux ayant été fixés à 450 unités, le résultat représente le quadruple de ce qui était espéré. Conséquence : la liste d’attente s’allonge à minimum six mois. L’usine de Gunma ne peut pas faire de miracle, elle tourne à plein régime (c’est à Subaru qu’incombe la tâche de la production, après que Toyota se soit assuré que les installations avaient été révisées selon ses standards).

23h00. Après un excellent repas et quelques discussions, j’emprunte les clefs d’un des deux véhicules qui sera ramené en Suisse par la route dès le lendemain matin. Ma demande n’est pas innocente ; où que j’aie été, j’ai toujours essayé de faire en sorte de conduire la nuit dans une ville qui m’était inconnue, car je trouve qu’il n’y a que de cette manière que l’on réussit à capter l’essence-même de la ville en question, or même si je vais rester le lendemain pour la visiter, je veux tenter d’abord de découvrir les secrets de Barcelone au cœur de cette douce nuit d’été avant l’heure.

Ironie du destin ou non, longue de presque une dizaine de kilomètres la route qui mène de l’hôtel à la ville est digne des “touge” les plus fous d’Initial D, mais malheureusement je me retrouverai rapidement coincé derrière des chicanes mobiles, aussi bien à la descente qu’à la remontée deux heures plus tard.
C’est en arpentant les rues de la capitale catalane que je découvre le deuxième point faible de ma monture. L’embrayage est trop léger et bas dans la course de la pédale – m’en sont témoins les quatre fois où je calerai. Une fois la voiture lancée, le détail n’a pratiquement pas d’incidence, mais lors d’arrêts et de départs répétés à cause des feux rouges à foison, à moins de faire patiner l’embrayage, l’exercice s’avère ardu. Je me console en me disant qu’il s’agit presque d’une nécessité afin de rendre la voiture accessible aux personnes de tout âge et que le succès commercial permettra sans doute d’offrir des versions plus radicales.

Les divers piétons que je croise la scrutent, l’air étonné, ne parvenant visiblement pas à identifier le modèle. Durant une pause prolongée devant Sagrada Familia, plusieurs jeunes filles viendront même se prendre en photo à côté. La GT86 peut se montrer fière d’avoir volé la vedette ne serait-ce que momentanément à un monument tel que l’œuvre inachevée de Gaudi. Tout comme Barcelone, la GT86 a le poids de l’Histoire sur ses épaules, toutes celles qui l’ont précédée la regardent d’en haut, attendant qu’elle redore un blason désormais poussiéreux et le brandisse à la face du monde entier en hurlant de ses pneus : « Drift is alive ! », mais quelque part je suis certain que, comme moi à cet instant, leur regard est empreint de confiance et bienveillance, car Tada-san et toute son équipe ont réussi à insuffler ce qui fait la valeur des plus grandes : une âme. La GT86 n’est faite que pour une chose : ramener sur vos lèvres ce sourire enjoué de la première fois où vous avez découvert que l’automobile pouvait être fun, tout comme la première fois où vous vous êtes surpris à réussir ce petit travers dont vous ne vous croyiez pas forcément capable. It’s gone 86 ? Hell no ! Qu’on se le dise aux quatre coins du monde : chez Toyota, la passion est bel et bien de retour au menu !

Face à la concurrence

Toyota GT86 Hyundai Genesis Coupe V6 Megane Renault Sport Trophy Mazda MX-5
Moteur 4 cyl. boxer 1998 cm3 V6 3778 cm3 4 cyl. 1998cm3 turbo 4 cyl. 1998 cm3
Puissance (ch / t/min) 200 / 7000 303 / 6300 <265 / 5500 160 / 7000
Couple (Nm / tr/min) 205 / 6400-6600 361 / 4700 360 / 3000-5000 188 / 5000
Transmission Roues AR Roues AR Roues AV Roues AR
Boite à vitesses 6 rapports – manuelle 6 rapports – manuelle 6  rapports – manuelle 6 rapports – manuelle
RPP (kg/ch) (6.2) (5.24) 5.39 7.66
Poids DIN (constr.) (1239)
(53% AV/47% AR)
(1587) 1430 (1462)
63.1% AV/36.9% AR
1225kg (1165 kg)
0-100 km/h (sec.) 7.6 6.4 6.0 7.6
Vitesse max. (km/h) 226 240 254 213 km/h
Conso. Mixte (constr.) (7.8) (10.3) 10.8 (8.2) (7.8)
Réservoir (l) 50 65 60 50
Emissions CO2 (g/km) 181 246 190 181
Longueur (mm) 4240 4630 4299 4020
Largeur (mm) 1775 1865 1848 1720
Hauteur (mm) 1285 1385 1435 1245
Empattement (mm) 2570 2820 2636 2330
Coffre (L) 243 332 377/1024 150
Pneumatique AV 215/45/17 225/40/19 235/35/19 205/45/17
Pneumatique AR 215/45/17 245/40/19 235/35/19 205/45/17
Prix de base (CHF) 41’900 CHF 40’890 CHF 41’400 CHF 41’150 CHF
Prix de base (EUR) 29’900 € 37’900 € 29’850 € 30’600€

Galerie de photos

Crédit photos: Emmanuel Louis, Jean-Pierre Pasche et Toyota.

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