Le problème est qu'UBS "n'est plus" une banque suisse. Une bonne partie de son chiffre d'affaire est réalisé aux US. L'implication dans la banque là-bas est impressionnante. Et stratégiquement, Ospel et cts ont fait l'erreur de laisser trop de latitude aux responsables américains qui ont par ailleurs été les premiers à sauter lors de la première vague de drawdowns. Zurich n'avait quasi plus aucune visibilité sur les activités US, soit par manque de contrôle ou étant aveuglés par l'appât du gain. On ne dégage pas des dizaines de milliards de bénéfices en ne prenant aucun risque !
Je pense que nous n'en avons pas fini d'entendre parler des pertes abyssales, notamment chez les concurrents, qui eux communiquent de manière moins directe (cf. CS et l'annonce de résultats mirobolants et 2 semaines après qui annonce des amortissements... mirobolants eux aussi).
La question qu'il faut se poser maintenant, est comment gérer ces cadavres. Nous en sommes déjà à 30 mias d'amortissement. Que représentent ces 30 mias comparés à l'exposition totale de la banque sur l'immobilier américain, toutes catégories de qualité confondues ? 1%, 2%, 10%, 20% ??? Personnellement j'en ai aucune idée exacte. Mais prenons un exemple : admettons que UBS soit exposée pour 300 mias. Elle n'aurait amorti que 10%. Face aux incertitudes économiques aux US, il est impossible de prédire que vont devenir les 270 mias de risques restant d'ici à 2-3 ans. Si le marché repart, fine. Si la situation continue à se dégrader, quid ???
A une échelle plus petite, la BCV lors de sa recapitalisation de 1 mia il y a quelques années, a vécu quasi la même situation. En prenant les mesures adéquates, les crédits à risques de la banque ont été remboursés dans la quasi totalité, ce qui lui a permis de racheter ces actions et rembourser à l'Etat (principal actionnaire "sauveur") sa mise, avec une plus-value substantielle si je ne m'abuse. Et tout ça avec une palette d'activités bien moins large que celle d'UBS !
L'objectif autant de Singapour, du gars des Emirats et maintenant des banques étrangères participant à la recapitalisation est exactement le même. UBS va continuer à gagner de l'argent grâce à ses autres divisions. Sur le moyen-long terme la banque va se refaire une santé.
Chez nous UBS reste avant tout une banque de proximité, et le fait de voir valser des milliards et impressionnant. Il y a dans l'opinion une conjonction de faits qui provoque une confusion énorme. Les activités aux US n'ont rien à voir avec l'activité en Suisse, notamment du simple fait qu'il s'agit de divisions séparées et dont les comptes sont clairement séparés. Les crédits hypothécaires faits aux US ne l'ont pas été faits grâce aux fonds des épargnants suisses !
Le risque d'un grounding d'UBS est quasi nul à mon avis. Premièrement, les fonds d'épargne sont garantis à hauteur de CHF 30k par client par le fonds commun des banques suisses auquel toutes les banques cotisent justement en cas de banqueroute de l'une d'entre elles.
Enfin, les fonds déposés sous forme de titres n'entrent aucunement dans la masse en faillite, le contrat de dépôt étant un mandat et les avoirs sous cette forme n'entrent pas dans les actifs de la banque. Enfin, l'expérience à montrer, avec la faillite de la Spar- und Leihkasse de Thun par exemple, qu'au final tout le monde a retrouvé ses billes.
Au sujet des responsabilités. Ici aussi le débat est houleux. Ospel s'en est mis plein les poches durant ses 10 ans à la tête de l'UBS. Certes sa rémunération était indécente en terme de chiffre, mais ce qu'il faut savoir c'est que lui aussi subit de plein fouet la crise ! En effet, sur 20 mios de "salaire", la part de cash n'est que de 2 à 3 mios, le reste étant des options et actions. Comme moi, lui aussi s'est ramassé un sacré bouillon ces derniers temps et paie à quelque part les risques qu'il a fait prendre à la banque.
L'Etat aussi, avec les rentrées fiscales en a bien profité. Chaque travailleur suisse, au travers de sa caisse de pension aussi. Il ne faut pas oublié que près de 60 mias de CHF ont été versés au titre de dividende ces dernières années !
Pour revenir à la crise elle-même et ses causes ménage doit être fait à la banque (ce qui a commencé). Les risques au bilan ont bien diminué.
Mais du côté politique aussi les responsabilités doivent être prises.
Je pense que la belle époque de l'auto-régulation du secteur bancaire est terminée. Le niveau de complexité de l'activité est tel que le Conseil Fédéral et les différentes commissions adhoc pour le secteur bancaire sont largement dépassées ! Il est grand temps que nos élus prennent le taureau par les cornes et donnent enfin les moyens à la CFB d'effectuer des contrôles sérieux, et surtout avec des personnes compétentes, voire créer un organe de contrôle indépendant pour les marchés financiers. Il est un peu facile de jouer aujourd'hui les vierges effarouchées en venant dire que tout ne leur a pas été montré lorsqu'ils ont posé leurs questions. C'est surtout que la CFB n'a pas vu ou voulu voir la situation effective de l'UBS !!! Comment voulez-vous qu'une équipe de 7 personnes en charge du dossier UBS à la CFB puisse contrôler et avaliser le travail de plus de 3000 personnes à l'UBS ????
Bref, la saga subprime continue, et j'attends avec impatience les annonces des autres établissements...
